C'est une mesure qui "rend justice à des milliers de maires de petites communes", a soutenu la sénatrice centriste Sylvie Vermeillet, rapporteure pour avis (au nom de la commission des Finances) du projet de loi de réforme des retraites. Elle est "essentielle pour nos élus", a renchéri René-Paul Savary, rapporteur de la commission des Affaires sociales.
La mesure en question, désormais inscrite à l'article 11 du projet de réforme, était défendue par plusieurs groupes du Sénat et par le gouvernement lui-même. Elle a fait logiquement partie des amendements que celui-ci a retenus après avoir activé, sur la base de l'article 44 de la Constitution, la procédure du vote unique sur l'ensemble du projet de loi.
Attractivité des mandats
Afin d'"améliorer l'attractivité des mandats", les dispositions identiques (voir l'une d'elles) qui ont été acceptées par le gouvernement visent à ouvrir à nombre d'élus locaux la possibilité d’être assujettis, à leur demande, aux cotisations de sécurité sociale sur les indemnités de fonction qu'ils perçoivent. Les élus concernés n’ont pas cessé leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat et, par ailleurs, ils perçoivent des indemnités de fonction mensuelles brutes inférieures à la moitié du plafond de la sécurité sociale (1.833 euros mensuels). Aujourd'hui, ces indemnités de fonction ne sont pas assujetties aux cotisations de sécurité sociale. Sylvie Vermeillet a pointé le problème : "Notre système démocratique local repose sur l’engagement des élus", mais "au détriment souvent, de la création de droits à retraite". Ces élus qui n’acquièrent donc pas de droits à la vieillesse de base sont très nombreux : "plus de 80% des maires, quasi exclusivement de communes de moins de 4.000 habitants, sont potentiellement concernés".
En outre, l'amendement étend la possibilité d'un rachat de trimestres de retraite aux périodes de mandat électoral, quel que soit le nombre de trimestres validés pour une même année. En effet, l'actuel dispositif de rachat de trimestres est ouvert seulement pour les années incomplètes, empêchant le rachat de trimestres pour des années au cours desquelles un élu n'en aurait validé aucun. Ces rachats de cotisations manquantes permettent de conforter la pension de retraite des assurés. Ils sont limités à douze trimestres.
Sapeurs-pompiers volontaires
De la reconnaissance de l'engagement des élus locaux à celle des sapeurs-pompiers volontaires, il n'y avait qu'un pas. Sur ce sujet, le Sénat et le gouvernement ont fait preuve là encore d'unanimité. Les amendements acceptés par ce dernier (voir l'un d'eux) prévoient une majoration de la durée d’assurance pour la retraite des sapeurs-pompiers volontaires. La bonification se fera sous la forme de l’attribution de trois trimestres au bout de dix ans d’engagement. Au-delà, ils se verront attribuer un trimestre supplémentaire tous les cinq ans. Cette bonification vient en complément de la revalorisation de la prestation de fidélisation et de reconnaissance consécutive à la publication de novembre 2021 valorisant le volontariat des sapeurs-pompiers (loi Matras), a précisé lors de la séance le ministre du Travail, Olivier Dussopt. Il est toutefois précisé que la mesure adoptée "ne peut conduire à porter au-delà de quatre le nombre de trimestres validés par un assuré par année civile" dans les régimes de base et complémentaires.
Plusieurs autres amendements retenus par le gouvernement concernent les fonctionnaires. L'un d'eux prévoit que les périodes au cours desquelles les assurés étaient aidants ou parents au foyer, mais affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), sont prises en compte pour le bénéfice de la retraite de base de la fonction publique (minimum garanti). Un autre étoffe les informations qui sont transmises aux assurés tous les cinq ans à partir de 55 ans. Elles devront inclure des indications "sur les règles applicables aux fonctionnaires en matière de cumul emploi-retraite".
Retraite progressive
Le projet de loi tel qu'adopté par les sénateurs ne prévoit pas la possibilité pour les salariés et les fonctionnaires de bénéficier de la retraite progressive dès l'âge de 60 ans, contrairement à ce que souhaitait le rapporteur, René-Paul Savary (voir notre article du 1er mars). Son amendement n'a pas trouvé grâce aux yeux du gouvernement. En l'état des discussions sur la réforme, le dispositif doit pouvoir être ouvert à partir de 62 ans. En revanche, l'exécutif a donné une suite favorable à des amendements qui encadrent les possibilités pour les employeurs de refuser d'accorder un temps partiel sollicité au titre de la retraite progressive. Le code du travail sera complété pour que la réponse de l'employeur à une telle demande soit nécessairement "écrite et motivée".
Les marges de manœuvre de la majorité sénatoriale étaient relativement étroites sur la réforme. Elles ont encore été restreintes par l'utilisation par le gouvernement du "vote bloqué". Toutefois, avant que celui-ci ait eu recours au procédé, les sénateurs avaient adopté une série d'amendements, dont un qui grave dans le marbre le principe de la compensation par l'Etat de la hausse d'un point des cotisations dues par les employeurs territoriaux et hospitaliers à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
Semaine décisive
"Une étape importante a été franchie avec un vote large du texte de la réforme des retraites au Sénat", s'est félicitée la Première ministre après le vote de la Haute Assemblée. La suite va se jouer ces prochains jours. Avec, d'abord, la commission mixte paritaire qui se tiendra le 15 mars, au cours de laquelle députés et sénateurs vont chercher à s'accorder sur un texte de compromis. Dans l'hypothèse d'une réunion conclusive, le projet de loi retournera le 16 mars au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, pour un vote.
Le texte sera définitivement adopté si une majorité des députés approuve le texte. Ce qui est loin d'être acquis, compte tenu des réticences d'un certain nombre de députés de la majorité et du groupe Les Républicains. Voulant éviter le recours à l'article 49.3 de la Constitution pour faire passer son texte, l'exécutif s'emploie donc à dissuader ces parlementaires de voter négativement.
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