Après une semaine de fortes perturbations dans les transports publics et deux journées de grèves et de manifestations interprofessionnelles, le Premier ministre a confirmé les grands principes de la réforme des retraites voulue par l'exécutif, tout en annonçant plusieurs ouvertures dans l'objectif de faciliter son acceptation. A la mi-journée, ce mercredi 11 décembre, Edouard Philippe a prononcé pendant près d'une heure une allocution très attendue, dans l'hémicycle du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Pour tenter de gagner la confiance des Français, le Premier ministre a annoncé plusieurs garanties, dont une concernant la valeur du point. "Nous demanderons aux partenaires sociaux de fixer sa valeur et son évolution, sous le contrôle du Parlement", a-t-il promis. En outre, la valeur des points acquis sera progressivement indexée sur les salaires, soit un indicateur plus favorable que l'évolution des prix. En outre, cette valeur ne pourra diminuer.
Le gouvernement tente de faire baisser la tension en reculant l'entrée en vigueur du système universel de retraites, qui sera un système par répartition (comme aujourd'hui), fondé sur un décompte non en trimestres, mais en points ("chaque heure travaillée ouvrira des droits"). Dans son rapport de juillet dernier, le Haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, envisageait une application "au plus tôt aux personnes nées en 1963" et ce à partir de 2025. Le gouvernement n'a pas retenu cette hypothèse. La première génération concernée par la réforme sera celle de 1975. Les actifs nés cette année-là prendront leur retraite "vers 2037", a calculé le Premier ministre. Mais "70% de la retraite de ces personnes seront encore calculés selon l’ancien système". Le basculement vers le système sera très progressif. Ce sera également le cas pour les personnes qui rejoignent le nouveau régime : "Toute la partie de carrière effectuée jusqu’à 2025 donnera lieu à une retraite calculée selon les anciennes règles", a détaillé le Premier ministre. La génération 2004, qui aura 18 ans en 2022, sera la première à intégrer le nouveau système.
Age d'équilibre de 64 ans en 2027
L'âge minimal de départ à la retraite demeurera à 62 ans. Mais pour obtenir un taux plein, les Français devront travailler jusqu'à 64 ans. Un système de "bonus-malus" les incitera à "travailler plus longtemps", selon Edouard Philippe. Suivant des prévisions établies par le Conseil d'orientation des retraites, le rapport Delevoye préconisait de fixer à 2025 l'entrée en vigueur de la mesure. Mais l'exécutif a décalé cette échéance à 2027.
Toutefois, une possibilité de départ à taux plein avant 64 ans sera également ouverte au bénéfice des travailleurs handicapés. En outre, le dispositif des "carrières longues" sera maintenu : les personnes qui ont commencé à travailler avant l'âge de 20 ans pourront continuer de partir deux ans avant les autres. Ceux qui exercent "des métiers usants" bénéficieront du même avantage.
Le rapport Delevoye prévoyait une extinction progressive du dispositif des "catégories actives" dans la fonction publique (qui donne la possibilité aux agents qui exercent des métiers pénibles ou dangereux de partir en retraite de manière anticipée). A la place, il prévoyait d'élargir au secteur public le compte pénibilité en vigueur aujourd'hui dans le privé. Edouard Philippe a confirmé cette option. En outre, les pompiers et les policiers (à l'instar des militaires et des gendarmes), continueront à bénéficier de dérogations d’âge et de bonifications de durée.
La concertation continue
Confirmant que, dans le secteur public, les primes des agents seront prises en compte pour le calcul des pensions, le chef du gouvernement a estimé que "pour des millions de fonctionnaires, ce sera une avancée majeure". "Leurs primes leur permettront d’acquérir des droits", a-t-il souligné, sans pour autant préciser le calendrier et les éventuelles mesures destinées à accompagner ce changement.
Après une présentation en conseil des ministres le 22 janvier prochain, le projet de loi de réforme des retraites sera en discussion au Parlement à partir de la fin février. "Il renverra à des ordonnances ou à des décrets les précisions sur les transitions", a précisé Edouard Philippe. En assurant que "le dialogue social va continuer pour en préciser les modalités".
Sous la houlette du Haut-commissaire à la réforme des retraites, la concertation sur la réforme, avec les représentants des organisations syndicales et des employeurs, a débuté dès cette semaine. Pour la fonction publique, des bilatérales sont prévues sur trois thèmes : prise en compte des primes et assiette de cotisation ; pénibilité ; dispositif de transition. Au total, pas moins de 27 réunions seront organisées d’ici à janvier 2020. Parmi les scénarios proposés à la réflexion par Jean-Paul Delevoye pour intégrer progressivement les primes dans l'assiette de cotisations : appliquer un taux spécifique à ces dernières. Cette hypothèse "permet de lisser la montée en charge, avec un effet identique quelle que soit la catégorie ou la part de primes", avancent les services du Haut-commissaire. "Pour une transition de 15 ans, le taux de cotisation pourrait ainsi être relevé pour les seules primes de 0,5 point par an".
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