Après plus d’un an de discussions, la Commission européenne a adopté, mercredi 3 mars, une proposition visant le renouvellement du régime de l'octroi de mer pour la période 2022-2027. L’octroi de mer est une particularité française. Il s’agit d’une taxation spécifique aux départements d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion) sur les produits importés. Elle permet dans le même temps de promouvoir la production locale en appliquant des taux différenciés.
La proposition procède au passage à plusieurs modifications :
- à la demande de la France, la Commission relève le seuil d'assujettissement à 550.000 euros (contre 300.000 euros actuellement), "permettant aux petites productions mais aussi à l'essentiel des productions nouvelles de sortir du champ de la taxe" souligne la Commission ;
- la Commission "introduit davantage de transparence dans les critères de sélection des produits pouvant bénéficier d'une exonération ou d'une réduction d'octroi de mer". Concrètement, les produits devront être sélectionnés "sur la base de l’existence de surcoûts de production renchérissant les prix de revient de la production locale par rapport aux produits provenant de l'extérieur et compromettant la compétitivité des produits fabriqués localement, lorsque la production locale a une part de marché inférieure à 5% ou bien lorsque sa part de marché est supérieure à 90%" ;
- la Commission révise les différentiels de taxation maximaux autorisés (jusqu'ici, trois catégories de produits avec des différences maximales de 10, 20 ou 30% – ici, deux catégories de produits avec des différences maximales de 20 et 30%) ;
- la France devra soumettre au plus tard le 30 septembre 2025 un rapport de suivi – au contenu renforcé – à la Commission lui permettant d’évaluer si les conditions justifiant l'application du régime continuent d’être remplies.
Les collectivités d'outre-mer opposées à "toute modification, même à la marge"
Reste à savoir quelle sera la réaction des collectivités concernées, pour lesquelles l'octroi de mer constitue une ressource financière majeure. En effet, "alertées à plusieurs reprises sur des risques de remise en cause" de ce régime, ces collectivités et régions d’outre-mer, réunies dans le cadre de la commission Outre-mer de Régions de France, avaient le 9 février dernier adopté une résolution commune dans laquelle elles réaffirmaient unanimement leur refus de "toute modification, même à la marge, des modalités".
Cet "impôt très ancien, vieux de plusieurs siècles", dixit le site de la Commission, est régulièrement décrié, notamment parce que dérogatoire au traité sur le fonctionnement de l'Union. Il est aussi souvent accusé d'être responsable de la vie chère.
En mars 2020, un rapport de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international – commandé par Bercy – en préconisait purement et simplement la suppression.
De son côté, la Commission avait publié en mai 2020 une étude plaidant au contraire pour son maintien, estimant d'une part "que son remplacement par d'autres mesures d’aides similaires de l'UE ne semble pas faisable/désirable" et d'autre part que sa suppression "sans aucun remplacement porterait un préjudice important aux activités de productions locales, entraverait la résistance des régions ultrapériphériques aux chocs économiques mondiaux et priverait les budgets publics locaux d'une composante non négligeable".
La proposition doit désormais être transmise au Parlement européen pour consultation et au Conseil pour approbation avant la fin juin. Sa transposition en droit français se fera au second semestre 2021.
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