Jean-Marc Ayrault pour "la suppression des dpartements de la premire couronne"

April 2024 · 6 minute read


Mardi 14 janvier, François Hollande déclarait que le nombre des régions "peut évoluer" (voir notre article ci-contre). Dès mercredi, les commentaires sur d'éventuelles fusions de régions s'étaient emballés et faisaient notamment les gros titres de la presse régionale.
Ce jeudi 16 janvier, Jean-Marc Ayrault, invité de la matinale de France Inter, était interrogé sur les propos présidentiels en matière de réforme territoriale. Et lançait alors une petite phrase qui allait faire que le sujet du jour ne serait plus les régions mais les départements – et, plus précisément, les départements franciliens. "Je suis favorable à ce que l'on aille vers la suppression des départements de la première couronne (...) On a besoin de métropoles et autour des métropoles, il faut simplifier." De quoi en faire sursauter plus d'un, il est vrai, lorsque l'on songe à quel point la métropole du Grand Paris telle que prévue par le projet de loi Lebranchu a donné lieu à d'épineux débats pour finalement parvenir à un fragile compromis.
Réinterrogé un peu plus tard dans la journée, en marge de sa visite officielle en Autriche, sur ce vœu de suppression des départements de la première couronne (soit les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne), le Premier ministre a enfoncé le clou… sans être vraiment plus explicite.
"Un projet de loi se prépare, le deuxième du quinquennat, sur la décentralisation", a ainsi rappelé Jean-Marc Ayrault, cité par l'AFP. Cette future loi "va porter sur le renforcement du pouvoir des régions en allant très loin dans la décentralisation de certaines compétences", a-t-il poursuivi, indiquant avoir "cité à titre d'exemple" le cas 92, 93 et 94 pour simplifier un "mille-feuille" territorial "pas toujours efficace et surtout qui coûte cher". "Je considère que pour l'avenir, c'est une bonne solution", a redit le chef du gouvernement. Selon lui, un référendum n'est pas la bonne solution sur un "sujet aussi complexe". "Cela ne peut pas être une réponse par oui ou par non. C'est au Parlement de faire un travail de fond et de trouver la bonne solution."

"Inacceptable" ou en tout cas prématuré

Le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), Claudy Lebreton, a réagi jeudi en fin de journée, indiquant qu'il "prend acte de la volonté du gouvernement d’ouvrir ce débat conséquent et demande donc - afin d’en évoquer précisément les enjeux – à être reçu dès que cela sera possible par Jean-Marc Ayrault". Car pour lui, "il serait périlleux d’envisager une telle évolution institutionnelle sans en mesurer toutes les conséquences, notamment en matière d’exercice des solidarités sociales et territoriales". Et dans le cas spécifique du Grand Paris, il faut commencer, estime Claudy Lebreton, par "assurer une mise en place effective et efficiente de la nouvelle métropole" avant de songer à passer à une nouvelle étape. Faisant cette fois plutôt allusion aux propos de François Hollande érigeant le cas de la métropole lyonnaise en exemple à suivre, le président de l'ADF rappelle que "tous les départements "ne ressemblent pas, loin de là, au Rhône" et qu'une "mutualisation de services ne peut être conçue dans la précipitation".
Quant aux principaux intéressés… leurs réactions étaient évidemment prévisibles. Notamment celle de Christian Favier, le président PCF du Val-de-Marne, qui a jugé l'idée du Premier ministre "tout simplement inacceptable". Celui qui s'était déjà farouchement opposé à la création de la métropole du Grand Paris entend donc, "comme sénateur et comme président du conseil général du Val-de-Marne, [s]'employer à faire échec à ces projets de suppression", dénonçant le fait de prendre les collectivités pour "des pièces de Lego que l'on peut désassembler et assembler à loisir". Christian Favier proposera que soit adopté lundi, lors d'une séance extraordinaire de l'assemblée départementale initialement consacrée à la réforme de la carte cantonale, un voeu contre le projet du gouvernement.
Le communiqué de Stéphane Troussel, président PS du conseil général de Seine-Saint-Denis, s'est montré moins frondeur : "Depuis des mois, au nom de l'égalité des territoires, j'ai défendu le projet de métropole du Grand Paris : ne brûlons pas les étapes et concentrons-nous d'abord sur la réussite de cette métropole telle qu'elle vient d'être définie par la loi. La question du rapprochement des départements de Paris et de la petite couronne se posera dans un second temps."
Quant au président UMP du conseil général des Hauts-de-Seine, Patrick Devedjian, il a qualifié la proposition de "totale improvisation". "Bien entendu, il faut fusionner un certain nombre de collectivités entre elles ; ce qui est amusant c'est qu'au mois de décembre la commission des lois de l'Assemblée nationale avait voté des mesures pour le faciliter et que le gouvernement les a refusées. On navigue en pleine incohérence", a-t-il déclaré sur BFMTV. Patrick Devedjian a également estimé que le gouvernement a changé de position sur la clause de compétence générale des collectivités, considérant que l'exécutif s'était jusqu'à présent "opposé à la spécialisation des collectivités".

"On ne peut pas y aller à la hache"

Par ailleurs interrogé, toujours sur France Inter, sur l'avenir de son département, Jean-Marc Ayrault s'est dit opposé au rattachement de la Loire-Atlantique à la région Bretagne, estimant que ce n'était "pas la bonne méthode".
"Est-ce que 22 régions, c'est trop ? Peut-on regrouper certaines régions ? On ne va pas prendre des bouts de région pour les mettre avec une autre. Ce sont des questions sérieuses. Mais ce chantier, il faut absolument l'ouvrir", a-t-il enfin ajouté.
Invitée à réagir sur une éventuelle diminution du nombre de régions, Marylise Lebranchu, la ministre en charge de la décentralisation, a semble-t-il tenu à tempérer les débats. Interrogée par RMC et BFMTV sur l'idée d'une "quinzaine" de régions émise la veille par le député socialiste Thierry Mandon, elle a assuré : "Ca, c'est son avis à lui, en tant que parlementaire, parce qu'on a n'a pas pris cette décision-là. J'en ai discuté à la fois hier soir avec le président de la République et le Premier ministre. On ne peut pas y aller à la hache. Si vous y allez à la hache, vous risquez de perdre une efficacité pendant un ou deux ans. Ce qu'on va proposer, c'est d'avoir une sorte de bonus-malus pour les collectivités territoriales en leur disant : si vous fusionnez, on vous encouragera y compris financièrement." Et la ministre de préciser que ceci ne concerne pas que les régions, "c'est aussi les départements sur les aires métropolitaines, les communes entre elles, les intercommunalités entre elles". "On encourage", a insisté Marylise Lebranchu. "Il y aura une loi, elle arrivera vers avril-mai" et comprendra notamment "une augmentation des compétences des régions". Mais "il n'y aura pas un couperet".

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